Romances de Jean-François Didier d'Attel de Luttange
Par Céline Carenco et Nicolas Moron
Éditeur : Symétrie
Partition publiée avec le soutien du CRULH et l'UFR Arts Lettres et Langues de Metz.
Déjà pratiqué dans les salons de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, le genre de la romance connaît sous l’Empire puis la Restauration une vogue sans précédent. Définie dans le Dictionnaire de musique de Jean‑Jacques Rousseau en 1768 comme un « Air sur lequel on chante un petit poème du même nom, divisé par couplets, duquel le sujet est pour l’ordinaire quelque histoire amoureuse et souvent tragique », la romance est un chant simple habituellement accompagné au piano. Accessible à de nombreux musiciens amateurs, la romance fait aussi le succès de chanteurs célèbres comme Pierre Garat (1762-1823) et de compositeurs reconnus comme Alexis de Garaudé (1779-1852). Dans un marché de l’édition musicale en pleine expansion, les ventes de romances, en feuillets séparés, en guise de suppléments à des journaux comme Le Ménestrel, dans des périodiques spécialisés comme le Journal d’Euterpe ou des anthologies comme le Chansonnier des grâces, connaissent un essor considérable.
Jean-François Didier Attel de Luttange s’adonne à l’écriture d’une vingtaine de romances, vraisemblablement au cours des années 1820 et 1830. Aujourd’hui conservées à la bibliothèque de Verdun, les pièces sont toutes présentes à l’état manuscrit dans le ms. 372, tome 6. Ce volume relié comporte aussi un grand nombre de copies manuscrites de romances pour lesquelles Attel n’a écrit que le texte littéraire ou que l’accompagnement musical, et quelques romances dont il n’est pas du tout l’auteur.
Parmi les romances dont Attel écrit les paroles et la musique, trois sont en lien avec son activité d’écrivain et ses romans publiés. Ce sont justement les trois seules à être éditées de son vivant : Le Chant du Damoisel (dont une version imprimée complète est conservée dans les papiers d’Attel à Verdun), La Dame de Rosange (dont le texte et la mélodie sont publiés dans le Chansonnier des grâces en 1821), et Le Diable au manoir (dont cependant la version publiée en 1824 dans le Journal d’Euterpe propose une mise en musique d’Alexis de Garaudé, et non la version d’Attel). Les autres romances présentées ici n’existaient jusqu’à aujourd’hui à notre connaissance qu’à l’état manuscrit.
Reflet d’une pratique amateur assez développée, la composition de ces romances, sur le plan musical aussi bien que poétique, connaît des fortunes assez diverses. Dans la dizaine de pièces retenues pour ce recueil, l’interprète se confrontera parfois à des difficultés de prosodie, en particulier dans les couplets suivants le premier car Attel n’a pas toujours veillé à la cohérence de l’intégralité de son texte avec la mélodie. Certains traits stylistiques dans l’écriture de l’accompagnement pourront aussi surprendre.