Les intendances françaises de l'espace lorrain au XVIIe siècle (1619-1698)

Alors que l'État moderne se construit en France depuis la fin de la Guerre de Cent Ans, les intendants de police, justice et finances, qui en sont perçus comme les agents les plus représentatifs, sont paradoxalement les plus tardifs à se mettre en place, puisque leur installation n'est définitive qu'au cours du XVII^e siècle. Si leur histoire dans le royaume de France est bien connue à cette période, c'est moins le cas dans les Trois-Évêchés, province frontière progressivement agrégée au royaume de France, ou dans les duchés de Lorraine et de Bar, occupés pendant une grande partie du XVII^e siècle. Les intendances - territoires et structures administratives qui regroupent l'intendant et les personnes lui permettant une gestion plus efficace de la province - qui mettent davantage de temps à s'installer de manière durable, sont encore moins bien connues dans ces espaces frontaliers. Cette thèse, en partant de l'étude de deux intendances françaises (en Lorraine et Barrois, et dans les Trois-Évêchés) se propose de réinterroger la construction de l'État français dans des marges territoriales vitales pour lui dans sa lutte face aux Habsbourg. Le travail ne vise pas à s'inscrire dans la vision linéaire de l'histoire lorraine, pensée par les historiens lotharingistes du XIX^e siècle uniquement dans un rapport frontal entre le royaume de France et l'espace lorrain dans son ensemble. Cette étude, en mobilisant l'intégralité des acteurs à l'œuvre (administration française centrale, intendants et subdélégués, institutions françaises dans la province, institutions locales, populations vivant sur le territoire) dans une optique multiscalaire, vise à s'intéresser à la construction de l'État et à son rapport avec les structures politiques et sociales préexistantes établies sur une frontière géographique, politique et militaire ; il s'agira donc d'y étudier le la construction et le fonctionnement de la monarchie administrative en pratique, ce qui permettra de poursuivre la réinterrogation de la notion d'absolutisme à cette époque.