L’aménagement du territoire n’est pas seulement une politique publique, décidée d’en haut par tel ou tel responsable. Il implique plusieurs catégories d’acteurs : chefs d’entreprises, élus locaux, dirigeants patronaux et syndicaux, opinion publique. Quels types de rapports entretiennent-ils avec les aménageurs, dans l’espace particulier des régions européennes d’industrie ancienne au cours du second XXe siècle ? Le projet « Efficacité entrepreneuriale et mutations économiques régionales en Europe du Nord-Ouest, du milieu du XVIIIe à la fin du XXe siècle », soutenu par l’Agence nationale de la recherche, a tenu sur cette question une journée d’études, le 7 mai 2009, au Centre régional universitaire lorrain d’histoire de l’Université Paul Verlaine de Metz. A l’heure où la dimension spatiale des phénomènes suscite l’intérêt grandissant des différentes disciplines de sciences humaines, une dizaine d’historiens, de géographes, de spécialistes de l’aménagement, venus de France, de Belgique et d’Allemagne, y ont confronté leurs approches, analyses et interrogations. On trouvera ici la quasi-totalité des communications entendues et discutées. Elles soulignent les multiples analogies présentes entre les régions d’industrie ancienne, qu’il s’agisse du Nord-Pas-de-Calais, de la Wallonie, de la Lorraine ou de la Ruhr. Malgré de sensibles différences, du fait de la diversité des cadres administratifs, de l’ancienneté des expériences passées, du contenu des références idéologiques, explicites et sous-jacentes, les acteurs et les responsables, publics comme privés, se trouvent confrontés aux mêmes problèmes : encombrement, pollution, médiocrité du cadre de vie, déclin relatif, puis absolu des bases de l’économie régionale. Pour y faire face, ils nouent entre eux des relations, de contenu et d’intensité variables, qui façonnent et remodèlent les politiques. Pourtant celles-ci, malgré l’ampleur des moyens mis en oeuvre, n’obtiennent pas toujours des résultats convaincants. Paradoxalement, en dépit d’une évidente communauté de destins, elles s’inspirent peu les unes des autres et ne cherchent pas à proposer un modèle européen de reconversion régionale. La remise en cause ultérieure de l’aménagement du territoire, le retour aux mécanismes de marché auxquels on assiste à la fin du XXe siècle, n’ont-ils pas leur origine, au moins partielle, dans les difficultés éprouvées par les différentes catégories d’acteurs à concevoir et à mettre en application un projet de développement qui soit à la fois commun et cohérent ?
