Bien que Maurice Ravel (1875-1937) et Alfred Cortot (1877-1962) aient vécu à la même époque, leurs noms évoquent implicitement deux images opposées : celles d’un compositeur moderne et d’un interprète romantique. Cette séparation, qui semble évidente au regard de l’œuvre des deux musiciens, est, de plus, accentuée par des tempéraments que rien ne semble rapprocher : Ravel, juvénile bien que solitaire et introverti, face à Cortot, sévère mais à l’extraordinaire vie publique.
Pourtant, en 1933, Cortot se décide à transcrire et adapter pour deux pianos le Concerto pour la main gauche, deux ans après la composition de Ravel. À l’origine commandé par le pianiste Paul Wittgenstein, ce Concerto est une des pièces de la première moitié du XXe siècle les plus emblématiques des difficultés liées au rapport compositeur/interprète. Déjà, dans sa conceptualité même, l’écriture pianistique pour une main implique une soumission de celui qui écrit envers celui qui lit. Mais, au-delà de ces enjeux idiomatiques, le Concerto « manchot » de Ravel, fera l’objet de plusieurs conflits, avec Wittgenstein d’abord, puis avec Cortot.
Commencée au cours du mémoire de Master 2, la réalisation de cette thèse, en partenariat avec la Médiathèque musicale Mahler et la Fondation Royaumont, nécessitera la consultation de fonds patrimoniaux en France et à l’étranger. L’objet de la thèse consiste à rédiger une étude complète portant sur les liens unissant Ravel et Cortot puis d’établir l’édition critique du manuscrit inédit de Cortot. Le double objectif sera de comprendre les enjeux esthétiques de cette œuvre singulière et de proposer une édition du manuscrit de Cortot, confrontée aux versions de Ravel.
Ainsi, cette thèse permettra, sans compter l’édition d’un manuscrit inédit destiné à être joué, de combler l’absence d’études à propos de la relation entre Ravel et Cortot et enfin d’envisager les problématiques de la transcription dans l’entre-deux-guerres.