ARES - Annuaire de Recherche sur les militairES (2020-2024)
Initié en 2020, le projet ARES – Annuaire de Recherche sur les militairES – a pu se développer grâce au financement du CRULH, du Pôle TELL (Humanités Numériques) et de la DPMA (Direction des Patrimoines, de la Mémoire et des Archives).
Le programme consistait à forger un corpus biographique numérique portant sur les officiers issus des grandes écoles (Polytechnique, Saint-Cyr, Navale). La période retenue est celle allant de 1794 à 1940, de la naissance de Polytechnique sous l’Empire à la fin de la IIIe République. L’outil vise à déterminer les contours des carrières de ceux qui sont amenés à devenir, par leur formation initiale, l’élite de l’armée ; il permet aussi d’étudier plus précisément le rôle des écoles militaires dans la sélection, la formation puis la promotion des officiers.
L’inspiration de la démarche scientifique puise ses racines dans l’étude passée des troupes coloniales (‘bigors’, ‘marsouins’ et secondairement les ‘tirailleurs’). Pour les deux premières catégories, les formations sont fondées sur des provenances scolaires diverses : les marsouins viennent de Saint-Cyr, les bigors de Polytechnique. Dans le cadre de leur emploi, ils doivent travailler avec les officiers issus de l’Ecole Navale (les bordaches). Par conséquent, pour bien comprendre la formation et l’emploi des troupes coloniales, il faut dépasser les divisions d’armées (Terre/Mer/Air) qui régissent le classement des archives et conditionnent les recherches de l’historien. Il faut au contraire rassembler des informations dispersées, les croiser et comparer la manière dont ces officiers ont servi la République, sur une longue durée. Au-delà de la diversité apparente des groupes, il existe une unité profonde (l’engagement militaire) et une sélection par une école « spéciale ».
ARES a été conçu comme un outil d’histoire sociale et culturelle du fait militaire. Il s’agit de forger un équivalent militaire du ‘Maitron’ (histoire sociale du monde ouvrier) de façon à identifier précisément les officiers issus du « recrutement direct », c’est-à-dire sortis des grandes écoles. Une fois achevé, l’outil numérique permettra d’objectiver ce milieu si spécifique, de mieux connaître le devenir des promotions, d’étudier le panachage du choix des armes à la sortie de l’école, de vérifier si ces formations sont fermées dans un entre-soi endogame et élitaire ou si la République a su, au contraire, par une politique volontariste, ouvrir les formations à tous les milieux.
ARES autorisera ainsi une sociographie très fine de l’institution militaire, au titre de la biographie, de la prosopographie ou de tout autre axe de recherche. Il s’agit donc là d’un outil de recherche, de connaissances et de pratiques professionnelles tout à fait important.
Entre 2020 et 2024, le travail de repérage et d’identification des élèves des écoles spéciales a été mené au sein de l’Université de Lorraine sous la direction de Julie d’Andurain. Plusieurs étudiants (Arthur Maunit, Quentin Petitgand et Léonel Noubou, Arnaud Perri, Remi Girardet, Alexandre Kintz, Nathan Andreo) et quelques doctorants (Kevin Seivert, Chloé Duvivier, Sam Couqueberg, Achille Tanoh) ont participé et participent encore à cette recherche qui s’est enrichie de partenariats institutionnels divers.
Aujourd’hui, l’identification du corpus est pratiquement achevée : il se compose de près de 25 000 polytechniciens, de 15 000 bordaches et d’un peu plus de 60 000 saint-cyriens, soit un groupe de 100 000 individus.
En 2025, ce programme va entrer dans une seconde phase. Elle consistera à alimenter la base de données CENHTOR de l’Université de Lorraine selon des critères scientifiques (production de métadonnées qui respecteront les principes du « FAIR »1 ), en ayant recours à une production participative (crowdsourcing).
Les principes FAIR (Findable, Accessible, Interoperable, Reusable) décrivent comment les données doivent être organisées pour être plus facilement accessibles, comprises, échangeables et réutilisables