En 1379, lorsque le roi de France se rend maître du terroir de Mouzon, Sedan n’est encore qu’un petit village anonyme coincé entre la Meuse et les premiers contreforts de l’Ardenne. En 1424, l’arrivée des seigneurs La Marck est un bouleversement important. Prenant appui sur un château fort, tirant profit de leur position frontalière, ils se mettent bientôt en quête d’un pouvoir souverain malgré ce que le droit édicte. Dans le dernier quart du XVIe siècle, leur quête se concrétise, en même temps qu’ils prennent le parti, d’abord risqué mais finalement bénéfique à bien des titres, de la Réforme calviniste. La principauté de Sedan devient à la fois une place forte de renom utile à la France, un refuge au cœur des guerres de religion, que l’on regarde avec abomination ou fascination, et un bastion du calvinisme dont les princes s’enorgueillissent. Au début du XVIIe siècle, l’édification d’une Académie protestante, en sus d’un collège des humanités et de petites écoles, contribue à l’apogée calviniste sedanaise. Des professeurs et étudiants, des quatre coins de France et d’Europe, affluent à Sedan et donnent à cette terre une réputation internationale que le prince s’attache à fortifier. Au tournant des années 1630-1640, l’abjuration des La Tour d’Auvergne, combinée à la reprise en main de la principauté par la France, annonce un retour à une situation qui obéit davantage à la politique royale. Le particularisme sedanais s’apprête à être battu en brèche, même si le gouverneur Fabert fait d’abord le choix de la douceur. À partir de 1681, les attaques, de plus en plus violentes à l’égard des Églises protestantes et leurs émanations, dont le collège académique, scellent le sort de la « Petite Genève ». À cet instant, dès lors clandestins, les protestants du Sedanais sont à l’épreuve des violences grandissantes en même temps qu’ils s’organisent pour leur survie. Prendre la route pour s’enfuir ou résister sont des possibilités, tandis que le voisinage relatif de Maastricht, Olne mais surtout Namur, où une Église protestante est élevée en 1713, permet autant d’entretenir sa foi que l’espoir d’un avenir meilleur devenu réaliste seulement un demi-siècle plus tard.