"Auteurs, compilateurs, administrateurs : les moines de Saint-Albans et le pouvoir, années 1350-années 1440"

Directeur / directrice de thèse hors CRULH
LACHAUD Frédérique
Date de soutenance
Membres du jury CRULH
Membres du jury hors CRULH
GOROCHOV Nathalie, rapporteur
LECUPPRE Gilles, rapporteur
COLLARD Franck, examinateur
WEILER Björn, examinateur
Lieu de la soutenance
Nancy

La thèse porte sur les rapports entre sphère politique et sphère religieuse dans le monastère anglais de Saint-Albans. On y étudie les différentes productions intellectuelles du scriptorium de l’établissement bénédictin (traités, chroniques, sermons, poèmes, textes encyclopédiques) et la manière dont le pouvoir politique et les débats du temps y sont représentés et questionnés. Pour mieux comprendre les prises de position des moines, nous avons étudié dans un premier temps les rapports que la communauté monastique entretenait avec les acteurs de la vie politique et les institutions du royaume. Une étude de la participation des moines à l’administration du royaume dans le cadre des franchises monastiques a montré que ces hommes étaient confrontés aux problématiques administratives locales, tandis que les abbés et leurs représentants fréquentaient les grandes assemblées politiques du royaume. Ces activités ainsi que l’attractivité du monastère, lieu de dévotion situé sur une voie de communication importante, expliquent que les moines aient été intégrés dans des réseaux à plusieurs échelles : les moines et leurs officiers laïcs pouvaient être proches des cercles des officiers du comté ainsi que de la noblesse. Ces liens personnels, institutionnels, et parfois commerciaux aident à identifier les sources d’informations des moines et à expliquer leurs prises de position, qu’ils exprimèrent dans différents ouvrages. L’analyse de la représentation du pouvoir dans les productions intellectuelles de Saint-Albans est l’occasion de comparer le traitement d’un même objet – le pouvoir – dans des œuvres appartenant à des genres variés et écrites par des moines aux expériences et aux origines différentes mais qui appartenaient à une même communauté. La représentation de la vie politique et des débats contemporains des moines dans des pièces de circonstances, des chroniques est ainsi étudiée et comparée avec la réflexion sur la nature et les limites du pouvoir royal observée dans les traités. Ces réflexions furent nourries par de nombreuses crises, notamment parlementaires, dans lesquelles furent repris des débats anciens sur l’exercice du pouvoir. Parmi eux, plusieurs concernent les rapports entre pouvoirs temporels et pouvoirs spirituels et furent notamment remis en avant par les propositions jugées hérétiques de Wyclif puis des Lollards, mais aussi par la nouvelle promulgation de statuts limitant les interventions pontificales dans les affaires anglaises par exemple. Ces questions sont étudiées dans une dernière partie théorique où l’on interroge les référentiels des moines, qui écrivent tour à tour pour défendre le pape et le roi, mais aussi et avant tout leur communauté alors que de nombreuses attaques sur les possessions monastiques sont lancées. La thèse cherche donc à réintégrer les aspects religieux dans les recherches sur la culture politique au Moyen Âge, en adoptant le point de vue d’hommes situés à la limite entre sphère politique et sphère religieuse, à une époque où la frontière entre pouvoir temporel et pouvoir spirituel est disputée.