Les métamorphoses des vulnérabilités : de la charité à la bientraitance. Représentations et perceptions des vulnérabilités sanitaires et sociales du XIXe siècle à nos jours : un essai de modélisation.

Directeur / directrice de thèse
Date de soutenance
Membres du jury CRULH
Membres du jury hors CRULH
LALOUX Ludovic, Rapporteur
EFMERTOVA Marcela, Rapporteure
BOIVIN Hélène, Examinatrice
Lieu de la soutenance
Salle 324, 91 avenue de la Libération, Nancy

Cette thèse interroge la manière dont les sociétés occidentales, et plus particulièrement la société française, ont perçu, nommé et pris en charge les fragilités humaines au cours des deux derniers siècles. L’étude se situe à l’articulation de l’histoire sociale, de l’histoire des sensibilités et de l’analyse des politiques publiques. Elle met en lumière la progressive constitution d’une « grammaire des vulnérabilités », articulant les dimensions sanitaire et sociale, et traduisant les transformations profondes des rapports entre individus, institutions et collectivité. L’enquête repose sur un corpus diversifié, associant textes normatifs et juridiques, débats parlementaires, archives associatives, statistiques, images, ainsi que des travaux préalablement publiés dans le cadre d’un carnet de recherche et sur la plateforme HAL. Trois grandes séquences structurent l’analyse : le XIXe siècle, qui constitue la matrice des vulnérabilités contemporaines avec l’invention du social et la montée du paupérisme ; le XXe siècle, marqué par l’essor et la consolidation de l’État social, puis par les recompositions liées aux crises économiques et sociales ; enfin le XXIe siècle, où émergent et se cristallisent de nouvelles vulnérabilités, révélées notamment par le mouvement des Gilets jaunes ou la pandémie de covid-19. Notre ambition est de proposer une modélisation historique des vulnérabilités sanitaires et sociales. Deux outils de synthèse — un tableau des mots employés pour qualifier les vulnérabilités et un tableau typologique des figures sociales associées — visent à donner une cohérence d’ensemble et à offrir une perspective comparative. Cette démarche, qui conjugue analyse historique et conceptualisation, entend démontrer que les crises politiques, économiques et sanitaires constituent des moments privilégiés de reconfiguration des représentations et des dispositifs de protection. En ce sens, cette recherche contribue à l’histoire des fragilités humaines en soulignant à la fois l’évolution des représentations et l’ambivalence des réponses institutionnelles, oscillant entre idéaux de solidarité et logiques de domination. Elle ouvre, enfin, une réflexion plus large sur la possibilité d’une société « bien-traitante », capable de dépasser la simple gestion des vulnérabilités pour en faire un levier de dignité et de cohésion sociale.